Mauvais plan de vol pour les compagnies aériennes ! Après la liquidation judiciaire d’Aigle Azur le 16 septembre, c’est au tour de XL Airways de se déclarer en cessation de paiement. Quand on se souvient qu’il y a quelques mois, Primera Air – octobre 2018 – et Wow Air – avril 2019 – ont également fait faillite, on s’interroge sur les causes de ce carnage. Mauvaise gestion ou dérégulation d’un marché livré à lui-même ?

Un équilibre fragile
Le marché du transport aérien est instable. L’émergence et la multiplication des compagnies low cost ont encore accru sa fragilité. Ce nouveau modèle, qui repose sur des prix bas grâce à une réduction des coûts, a profondément bouleversé une activité dont les marges sont faibles. En attirant de nouveaux clients et en démocratisant le marché, ce sont de nouvelles compagnies qui ont débarqué, avec des stratégies de conquête très agressives.

Les limites du libéralisme économique
Il n’y a pas plus libéral qu’un Revenue Manager ! Nous défendons la liberté d’entreprendre et les bienfaits de la concurrence qui ont permis à Monsieur Toutlemonde de voyager plus et moins cher. Nous croyons que le marché s’autorégule mieux qu’une prolifération de règles qui risqueraient de l’entraver. Hélas, l’actualité nous apprend que les cadavres s’accumulent dans les aérogares. Le cimetière des compagnies aériennes s’enrichit d’avions descendus en plein vol. Halte au massacre !

Bénéficiaire, récompensée et clouée au sol
XL Airways par exemple, a dégagé un million d’euros de bénéfices en 2016 avant d’être élue « meilleure compagnie de loisirs en France » par Skytrax en 2018. Forte d’une stratégie responsable reposant sur des coûts réduits et maîtrisés, validée par ses collaborateurs – aucune grève en 15 ans – la compagnie est aujourd’hui menacée de disparition.

Comment en est-on arrivé là ?
En 2015, la compagnie Norwegian Airlines se positionne sur le marché très porteur des Etats-Unis et des Antilles. Elle exploite trois routes à partir de Roissy CDG, multiplie et vend comme des petits pains des billets à des tarifs bradés. But de cette stratégie en deux étapes : l‘élimination de la concurrence en attirant leurs clients, puis une hausse des prix une fois débarrassée de ses adversaires. Difficile d’imaginer que ces tarifs « soldés » ne se font pas à perte, une notion assez floue qui transforme le marché en braderie.

C’est le far-west !
Norwegian Airlines a lancé les grandes manœuvres sans que quiconque puisse l’en empêcher. Ni un endettement record et irrationnel de 350 millions d’euros « investit » par des actionnaires sans scrupules, ni une quelconque réglementation sur le dumping, ni une instance qui veille au bon fonctionnement de son propre marché.
Aujourd’hui, la compagnie a dû mettre en garantie ses propres « slots » dans son fief de Gatwick et voit à son tour la faillite pointer le bout de son nez.

Vol 717 pour nulle part
Nous appelons à une règlementation de l’activité pour que cesse la prolifération de vols à perte sous prétexte que le marché est « prometteur ». Car autant le modèle d’Uber repose sur des investissements en marketing et dans la technologie pour développer leurs applications, autant la prolifération de billets qui ne couvrent pas leur prix de revient est un suicide qui entraîne tous ses acteurs vers le crash.

Qui sera le shérif d’airtown ?
Les instances de régulation ne manquent pas. L’IATA, qui normalise un certain nombre de flux d’informations, le COHOR qui attribue ces fameux « slots » sur les aéroports parisiens, l’Organisation mondiale du commerce, la Commission européenne, les Etats garants des pratiques anti-dumping… Qui instituera le bon droit et le fera respecter ?
Qui vérifiera la viabilité des projets, les pratiques et les risques qui déstabilisent tout le secteur ? Qui instaurera une véritable autorité de contrôle qui fait cruellement défaut ?

Oui au low cost, oui au yield, mais non aux gangsters qui mettent l’aérien à feu et à sang.